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CANTAL-LIENS

 

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...La généalogie autrement

 

Jacques d’Escars de La Roquebrou et ses funérailles en 1631

 

 

Un seigneur qui occupe une place sinistre et tragique dans les annales du marquisat de Laroquebrou Jacques de Pérusse d’Escars, marquis de Merville, de Montal-La Roquebrou, baron de Carbonnières, d’Ytrac, seigneur de Saint-Jean-de-Lespinasse, etc.. - chevalier de l’ordre du roi, - capitaine de cinquante hommes d’armes de ses ordonnances, - grand gouverneur du fort du Hâ à Bordeaux, - sénéchal de Guyenne. est le fils de François d’Escars et de Rose de Montal Il épouse le 27 janvier 1620 Magdeleine de Bourbon, fille aînée d’Henri II de Bourbon, chevalier des ordres du Roi, marquis de Malause, vicomte de Lavedan, baron de Miremont, etc.. et de Magdeleine de Chalons, dame de la Caze en Albigeois.
Ce personnage, au caractère difficile, d’une brutalité excessive, même en tenant compte des mœurs de son temps, semble dépourvu de toute sensibilité. Ne le voit-on pas protester lors de son contrat de mariage, sous prétexte que sa mère se réserve l’usufruit des biens qu’elle lui donne. Il avait succédé, très jeune, à son père dans la charge de sénéchal de Guyenne et fait un très brillant mariage en épousant la fille d’Henri II de Bourbon, qui, tout en l’apparentant à la famille royale, lui apportait une dot de plus de cent mille livres. Tout cela ne l’empêchait pas de donner fort à faire au vice-bailli des Montagnes d’Auvergne, Jacques de La Carrière, soit que, dès 1624, il guerroie contre le marquis de Montclar, cadet des Noailles, ses voisins de Pénières (commune de Cros-de-Montvert), soit, une fois réconcilié avec lui grâce aux bons offices du vicomte de Pompadour, qu’il tente, le 21 mars 1625, de conserve avec son ami le baron de Conros et cinquante cavaliers, d’enlever à Maussac, aux environs d’Arpajon, l’évêque de Saint-Flour, Charles de Noailles qui, en compagnie de son frère, le lieutenant général du roi en Haute-Auvergne, se rendait d’Aurillac à sa ville épiscopale ! Grâce au prévôt La Carrière, l’affaire fut manquée ; mais l’insécurité, due aux bandes du marquis de Merville, était telle que trois ans après, au mois de mars 1628, l’évêque, pour aller de Saint-Flour à son château de Pénières, dut requérir l’escorte du prévôt en personne, craignant d’être enlevé ou même mis à mort. Et trois plus tard, le 28 mai, Merville attirait dans un guet-apens, à Montvert et assassinait son oncle naturel, Vincent de Montal. Assassinat qui eut un retentissement énorme et fit passer un frisson d’horreur dans tout le pays.
Cette fois la mesure était comble et le meurtrier fut déféré, par le roi, au Parlement de Toulouse pour y répondre de son crime. Il fut condamné à mort et exécuté à Aurillac le 6 octobre 1629. Sa santé n’en fut pas ébranlée, le supplice fut figuratif. Tout cependant a une fin et la condamnation à mort de Jacques d’Escars était une terrible menace suspendue sur sa tête. Richelieu gouvernait la France et on ne badinait plus avec les arrêts de la justice. Aussi, notre homme se rendit à Paris pour implorer la clémence du roi et lui demander son pardon. Ce fut sa perte ! Tandis qu’il faisait des démarches pour obtenir des lettres de rémission, les archers du Cardinal, informés de sa présence dans la capitale, le cherchaient par toute la ville et, l’ayant trouvé, lui mirent sans façon la main au collet. Peu habitué à ces procédés, Merville dégaina, mais à peine son épée était-elle hors du fourreau, qu’il tombait percé de coups. La justice du roi, avec raison, n’admettait pas qu’on lui résistât. Cela se passait le mardi 7 janvier 1631. Il serait assurément injuste de juger l’homme et les événements en les isolant de l’époque et du lieu, n’empêche que le personnage était loin d’ être un ange de douceur et que nombre de ses voisins, en apprenant sa mort, durent pousser un long soupir de soulagement.
Magdeleine de Bourbon fit rapporter à La Roquebrou le corps de son époux qui fut déposé, le vendredi 24 janvier 1631, dans la chapelle du château. Durant près d’un mois, elle différa les obsèques qu’elle voulut somptueuses et, le lundi 17 février, le condamné à mort eut des funérailles princières : Cent prêtres ou religieux de tous ordres, des troupes à pied et à cheval, toutes les paroisses du marquisat au grand complet curés et consuls en tête, les représentants de la noblesse et de la bourgeoisie des environs, les partisans et les amis du défunt accompagnèrent le cercueil qui, suivant l’antique usage était entouré des consuls et des juges d’Aurillac en robe, précédés des huissiers et des massiers portant des flambeaux et des panonceaux aux armes de leur ville. Malgré l’étroitesse des rues et la déclivité du chemin, le pompeux cortège se rendit sans encombre du château à l’église Notre-Dame de Miséricorde où le seigneur du lieu allait dormir son dernier sommeil dans le magnifique tombeau que Jeanne de Balzac, sa bis-arrière-grand’mère avait fait édifier dans le chœur. Suivant une touchante et immémoriale coutume, legs du moyen-âge, Magdeleine de Bourbon avait fait convier les pauvres du pays. Indépendamment de cent pauvres du marquisat, vêtus de noir et à ses frais, qui précédaient le clergé, un cierge à la main, il en vint plus de quatre mille de toute la région, attirés par l’aumône qu’il était d'usage de distribuer en semblable circonstance. La presse fut si grande dans les rues et les remous si terribles que, sans parler des blessés, dix-huit ou dix-neuf de ces malheureux y furent écrasés ; et le même soir, ce monceau de cadavres rejoignait dans la tombe la dépouille du marquis de Merville, comme si, en ajoutant à ses propres victimes celles de ses funérailles, le ciel avait voulu en marquer la pompe inopportune.


Selon des extraits de - « Laroquebrou et ses environs » de Isidore Callé - « Laroquebrou et ses seigneurs » du Dr Louis de Ribier - et un article de la « Revue de la Haute Auvergne » Dans le livre de I.Calle, l’accent est mis sur le fait que l’époque, du fait des guerres de religion récentes, était encore très trouble. Il y est mentionné que l’organisation de funérailles somptueuses par l'épouse peut être interprétée comme un acte de protestation vis-à-vis du pouvoir royal. La famille espérait de l’audience royale, à Paris, une grâce certaine et la fin expéditive qui en est résultée fut inattendue et frappa de stupeur l’entourage du marquis…