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CANTAL-LIENS

 

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association de liaison pour la généalogie et l'histoire populaire du Cantal

...La généalogie autrement

 

Au son d’une cabrette, des larmes d’Auvergne sur le front du conflit …

Comment retranscrire ces textes sans se laisser aller à un attendrissement et éviter un apitoiement convenu ? Certes, le ton peut nous paraître lyrique mais il est dans la tournure d’époque et de circonstance. De celle qui nous fit dire « Ils ne passeront pas ! »

Voici donc ce qu’on peut lire dans « Le Figaro » du 2 octobre 1915 :

« Une compagnie du 16ème d’artillerie – régiment d’Auvergne- voulait danser la bourrée en musique et demandait une « chabrette », autrement dit une musette, ou si l’on veut un « biniou ». Nous avons envoyé l’instrument et voici l’accusé de réception du capitaine :

«  Aux Armées le 24 septembre 1915
Monsieur,
J’étais en mission à l’arrivée de votre lettre et du colis contenant la « chabrette » tant désirée.
Je ne sais comment m’exprimer pour adresser au Figaro les remerciements de tous nos braves et vaillants Auvergnats et vous dépeindre la joie qu’ils ont éprouvée à la vue de cette chabrette et de tous ses accessoires neufs et brillants.
Le deuxième canonnier-conducteur Cantuel, un « cabrettaire » de Salers (Cantal), s’en est emparé ; dès les premiers airs tous mes poilus accoururent de toutes parts, et, à l’ébahissement des gens du pays, ils dansèrent par couples une bourrée en règle qu’ils terminèrent par un « iou » formidable et des acclamations à l’adresse du Figaro.
Si vous aviez pu assister à ce début de la chabrette dans le département de … je suis sur, Monsieur, que vous auriez été heureux de vous rendre compte de la joie et du plaisir que vous avez procurés à ces braves gens. Une grosse larme perlait par-ci, par-là, sur des poils de barbe hirsute … léger et passager attendrissement au souvenir de leur Auvergna, de leurs montagnes qu’ils ont quittées depuis quatorze mois et où beaucoup ne sont pas retournés depuis ; ils revoyaient par la pensée le jour heureux de leur mariage, les cabrettaires munis de leurs instruments ornés de longs rubans de soie, précédant la jeune mariée et les invités, annonçant à tous les échos l’hymen des jeunes époux…
C’est  un peu de leur chère Auvergne que le Figaro leur a envoyé, ils lui en sont profondément reconnaissants.
Permettez-moi, cher Monsieur, d’ajouter mes remerciements aux leurs et veuillez agréer l’assurance de mes sentiments les meilleurs.
Capitaine Henry B …

P.S. – j’oubliais de vous dire que leur moral est excellent, plus vaillants que jamais ils sentent tous qu’il faut en finir avec cette race de barbares qu’ils ont vue à l’œuvre. C’est une grande satisfaction pour un officier d’avoir l’honneur de commander de pareils soldats »

Le journal ajoute :
«  On remarquera que cette lettre est datée du 24 septembre, la veille du jour où ses déclenchaient les offensives si splendidement préparées par nos artilleurs. Quelles bourrées ceux du 16ème n’ont-ils pas dû danser depuis une semaine ! »