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CANTAL-LIENS

 

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association de liaison pour la généalogie et l'histoire populaire du Cantal

...La généalogie autrement

 

 

1792, La paysannerie cantalienne prend en main sa contre-révolution

 


(suite et fin)
 
… Dans les villes même, une partie de la population pourtant acquise à la Révolution, allait suivre les messes dans les bois. La poursuite de ces religieux  était sans succès car ils étaient avertis par les habitants des campagnes et à Raulhac le maire lui-même avertissait le prêtre à temps pour qu’il puisse déguerpir.
Bien des élus assurant eux-mêmes la protection des prêtres réfractaires la population y trouvait un encouragement à s’engager dans l’opposition au camp des révolutionnaires. Les mesures répressives ne tardèrent pas et les prêtres insoumis furent déportés.
Les exactions commises par les soldats de la Révolution accentuaient un désir de révolte, voire de vengeance, chez les paysans. En l’an IV les campagnes n’étaient plus sures pour les autorités et le commissaire de la République ne pouvait plus guère compter que sur la garde nationale d’Aurillac et de St Flour.
A Bonnac, lorsque la garde vint pour arrêter le prêtre Tronchin, les femmes firent sonner le tocsin pour le prévenir et jetèrent des pierres sur les soldats.
A Sansac Veinazès deux gendarmes furent tués par la population
Il faut dire que la topographie des lieux aidait à la clandestinité et que les femmes étaient souvent les plus actives à protéger les représentants de l’Eglise et les objets du culte.
A Marcolès 15 d’entre elles furent arrêtées le 26 mai 1793
A Lescure, la mère Marty cacha la petite statue de Notre Dame, sous son tablier et devant les hésitations des hommes ce furent les femmes qui attaquèrent le convoi qui menait les cloches à Aurillac. Elles s’en emparèrent et les cachèrent pour ne les ressortir qu’en 1802
 
En l’an IV les actions atteignirent d’autres proportions, Delort; conduit à Aurillac fut délivré par 150 personnes et dans la même année un tract circulait dans les communes demandant aux populations de se réunir à Arpajon pour aller réclamer à Aurillac le libre exercice du culte.
Un esprit de révolte et de sédition s’installe presque partout, les réfractaires, les déserteurs et les réquisitionnés trouvent partout asile.
 
La chute de Robespierre ouvrit une période de  réaction religieuse et le 21 février 1795 la liberté de culte fut rétablie. Le retour des réfractaires fit renaître la ferveur religieuse et l’on constate en 1795 des mariages et des baptêmes en masse.
A Ytrac, St Etienne de Maurs, Rouffiac,St Etienne Cantalès, des femmes (encore elles ! ) arrachèrent les arbres de la Liberté et obligèrent les autorités à rendre les objets du culte.
 
Bien que l’on ne peut exclure la présence de quelques agitateurs politiques il ne fut toutefois jamais question de contre-révolution, il s’entremêlait seulement attachement à la religion, impôts toujours plus lourds, malversations révolutionnaires et recrutement des jeunes.
Plutôt que de contre-révolution il régnait une volonté de non révolution
 
Puis la lassitude, l’éloignement de la Révolution, le retour aux intérêts personnels, vinrent à bout des réactions désordonnées et les brèches ouvertes par la Révolution se refermèrent sur la Concorde…
 
(regroupement de différents éléments rencontrés sur divers documents aux AD 15  à l’occasion de recherches généalogiques) 
 
Un exemple d’opposition rurale aux révolutionnaires : les évènements de Ladinhac en 1792
 
Il est 7 heures du matin, le 13 avril 1792, dans la petite maison communale de Ladinhac faiblement éclairée par la lueur du jour naissant, les représentants du Directoire sont réunis, maître Destaing préside la séance.
Ont été convoqués Lagarde officier municipal maire de Ladinhac, Guillaume Fau et François Lestrade, tous témoins des évènements survenus dans la commune il y a un an.
Le curé de Ladinhac alors en place était l’abbé Joseph Trotapel, un digne vieillard auquel l’évêché avait confié deux vicaires en considération de son grand âge et de l’étendue de la paroisse, les abbés Delport de Vieillevie et Lantuéjoul de Marcolès.
D’un commun accord tous trois avaient refusé de prêter serment à la Constitution. La municipalité les considéra alors comme démissionnaires et convoqua les citoyens électeurs pour choisir un autre curé en accord, celui-ci, avec l’Assemblée constituante. Les voix se portèrent sur l’abbé Claude Bastide qui accepta la nomination qui fut ratifiée par le maire qui le vit venir avec une grande appréhension…
Effectivement l’abbé Bastide fut accueilli par tant de cris, de moqueries et d’injures que le maire fut obligé de faire appel à un détachement de la Garde nationale d’Arpajon. Devant tant d’hostilité l’abbé Bastide eut la sagesse de ne pas insister et de démissionner.
Un autre prêtre fut nommé : l’abbé Cantuel.
Les témoins déclarèrent au Directoire :
«  - l’abbé est arrivé à Ladinhac le dimanche trois avril de l’année dernière, accompagné de deux personnes et ils furent installés sans troubles dans l’auberge du village. C’est dans la nuit que l’auberge fut assaillie par des gens qui lancèrent des pierres contre la porte et l’aubergiste dû fermer ses serrures aux assaillants.
Le mardi 3ème de la fête de Pâques pendant que le nouveau curé assermenté disait la messe plusieurs habitants tournèrent autour de l’église en disant que ceux qui y assistaient n’étaient que des huguenots et que le dit curé n’était pas légitime. Tous ceux qui avaient assisté à la messe ont été tournés en dérision et l’un d’eux dû donner 5 livres pour être relâché.
Un habitant Jean Laborie monta sur le mur du cimetière en clamant à forte voix que l’aubergiste n’aurait pas dû loger le sieur Cantuel et qu’il fallait brûler sa maison »
Le curé assermenté fut contraint de partir à son tour et les deux vicaires évincés ainsi que les officiers municipaux déclarèrent qu’on se passerait bien de lui.
Le Directoire dressa procès-verbal et conclu qu’il était grand temps de prendre des mesures pour faire cesser l’agitation qui régnait dans cette commune …
 
(sources AD du Cantal, documents L28 et 38U4 des 13 et 21 avril 1792)