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CANTAL-LIENS

 

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association de liaison pour la généalogie et l'histoire populaire du Cantal

...La généalogie autrement

 

 

Il faut que la maison fume … 

 

Au-delà de l’amour du gain et de la possession il se trouve toujours en Auvergne ce besoin de conserver pour transmettre, « il faut que la maison fume » et pour cela on fait généralement d’un aîné l’héritier de la maison et des terres. Les cadets doivent alors s’en aller s’ils ne veulent pas devenir les domestiques de leur frère et si une tête rebelle se dispute un jour avec le père c’est la fuite obligée avec le baluchon sur le dos.
Si cette transmission peut paraître injuste il faut en modérer souvent les effets car avec le bien hérité le fils doit assurer sous contrat la garde et l’entretien de ses parents.
Il est fréquent que cette transmission oblige à partir en saison pour gagner un pécule permettant d’entretenir la ferme ou de l’agrandir.
Avant le départ on se rend chez le notaire pour donner procuration à sa femme ou à un parent et faire son testament avec un don à l’église pour assurer le salut de son âme.
On se regroupe avec un homme qui connaît la route et les étapes. On emprunte des chemins de campagne, à pied, à cheval ou accompagnés de mulets ou d’ânes bâtés. Les haltes se font dans des auberges bon marché  mais on peut tout aussi bien demander asile dans les fermes et coucher dans les granges.
Les candidats au départ sont tous munis d’un passeport donnant filiation, lieu d’origine et raison du déplacement (voir notre site http://cantal.liens.free.fr/Excel-non-adherent/passeport.xls ). Les contrôles sont sévères et peuvent intervenir à tout moment car il importe de se distinguer des vagabonds et hommes-errants sans feu. Malheur à celui qui va seul sur les chemins, il devra compter sur la force de ses poings ou sur la peur que peut inspirer son bâton. Il paiera le prix fort aux étapes.
Mais la règle de l’aîné n’est pas absolue, la volonté du père peut en décider autrement et parfois même se fixer sur une fille. Au mariage d’un fils c’est le père qui reçoit et dispose de la dote, elle sert parfois à désintéresser les autres enfants. Le nouveau ménage vit en commun avec les parents et plusieurs générations se retrouvent ainsi réunies sous le même toit, acceptant l’autorité du père aussi longtemps qu’il gardera son aptitude au commandement. Cette autorité passe alors sans secousse à l’héritier lorsqu’il est devenu en âge de se faire obéir.
Il y a souvent dans la maison des oncles ou tantes restés célibataires.
« il faut que la maison fume », ce sentiment est vivace et même en cas de mésentente il ne viendrait à l’esprit d’aucun enfant de vouloir partager ce qui doit rester à la maison, ce serait une monstruosité et le sentiment public indigné mettrait au ban de la paroisse celui qui manquerait à ce point au devoir familial.
Ce sont des terres trop pauvres et des hivers trop longs qui poussent les fermiers à quitter provisoirement le pays, après les semis de septembre, pour tenter de gagner un peu d’argent dans une émigration saisonnière.  Très souvent cette émigration était aussi provoquée par la lourdeur des impôts, l’espoir de régler des dettes familiales ou plus simplement d’être une bouche de moins à nourrir. C’était parfois encore l’espoir d’accéder à une condition sociale meilleure et libre face aux servitudes des hommes se louant à la tâche tels les brassiers ou les vachers.
Cette tradition d’émigration saisonnière est des plus anciennes au point même que sur l’Espagne elle s’était organisée depuis longtemps en véritable société d’accueil et d’encadrement (voir dans notre site La Compagnie de Chinchon http://cantal.liens.free.fr/V3-cantalous.php ). Sur l’Espagne les émigrés partaient de préférence sur Barcelone pour des raisons de plus grande proximité et de similitude de langue mais aussi sur Madrid pour bénéficier d’une meilleure sécurité en s’intégrant dans les cortèges des pèlerins de St Jacques. Les conditions de ces voyages en Espagne ou la dégradation financière de l’expatrié avait conduit à la création à Madrid d’un hôpital St Louis des français dans les registres duquel on retrouve un nombre important de nos cantaliens recueillis et soignés (voir dans notre site http://cantal.liens.free.fr/Excel/saint_louis.xls )
Avec l’implantation des chemins de fer dans notre pays cette émigration changea de direction autant que de visage et Paris devint une terre promise qui tînt souvent ses promesses. Nous en parlerons une autre fois …