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CANTAL-LIENS

 

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association de liaison pour la généalogie et l'histoire populaire du Cantal

...La généalogie autrement

 

 

1750 Les « toisons d’or » d’Aurillac

 

 

Au-delà de tous les phantasmes et les légendes accrochés aux chercheurs d’or auvergnats il faut aborder le sujet « en or », sans complexes.

Il existait dans la vallée de la Jordanne, une tradition aurifère très ancienne dont l’exploitation principale s’exerçait à Aurillac. Elle cessa son activité vers 1750.
On y exerçait l’orpaillage qui consistait  à recueillir les nombreuses paillettes d’or que la Jordanne entraînait dans ses eaux.
Depuis des temps très reculés on y plongeait des peaux de brebis en divers endroits choisis aux méandres de la rivière. Lorsque l’eau passait doucement sur la laine les paillettes en suspension s’accrochaient aux toisons.
L’existence de ces précieuses lamelles excita longtemps la curiosité des savants et l’imagination de la population rurale toujours en attente de mystère et de merveilleux.
Au 14ème siècle vivait Jean Roquetaillade, un moine qui s’était retiré au couvent des Cordeliers, à Aurillac. Très porté sur l’alchimie il recherchait, pour servir la chrétienté, à percer le mystère de la pierre philosophale qui servait, selon lui, à conduire à la perfection de l’âme et au bonheur de l’humanité.
En ce temps là Aurillac jouissait d’une grande renommée et l’art et l’érudition y brillaient à la fois. On venait de très loin fréquenter ses écoles et consulter de précieux manuscrits que le pape Sylvestre II envoyait de Rome et que des mains savantes recopiaient sans cesse en grec et en latin. Les écoles et monastères de la ville éclipsaient de très loin tous ceux de Clermont, Brioude, Riom et Issoire. C’est dans ce sanctuaire de la science que notre moine poursuivait ses recherches.
Loin des explications scientifiques le peuple préférait donner à ce métal mystique des explications surnaturelles. Les légendes se développèrent autour du thème de « la Toison d’or ».
Les anciens racontent que du temps des Gaules, les Arvennes (ou Auvergnats) des hautes terres, revenant d’une expédition lointaine où ils avaient pillé de nombreux trésors, voulant dissimuler leur richesse aux yeux de tous, la fondirent, broyèrent et mélangèrent à du sable. Ils en remplirent des outres qu’ils chargèrent sur des chevaux. Sur le point d’arriver au « Mons Celtorum » (aujourd’hui Plomb du Cantal), ils furent attaqués et vaincus. Ils n’eurent juste que le temps de jeter les outres dans les gouffres de la Jordanne, à la hauteur de Mandailles. Mais ils périrent tous, sans trahir le secret. C’est ainsi que la Jordanne restitua le trésor, mais, ajoute le peuple, elle a fait doucement, dans une grande sagesse, afin que les habitants pauvres jusqu’à ce moment, ne puissent pas s’en pervertir.

…  La preuve que ce récit est de la plus haute véracité, c’est que depuis ce temps, la ville a pris le nom d’AURILLAC ou AURI LACUS (Lac d’or).

Cependant, les esprits sérieux avaient remarqué depuis longtemps que la rivière présentait plus de paillettes après les orages et que les parcelles d’or contenues dans ses sables provenaient des terres voisines ravinées par les pluies.
Au 12ème siècle des bruits avaient couru, au Couvent des Cordeliers, qu’un abbé y était mort fort riche et que l’on retrouverait probablement un trésor dans son tombeau. La sépulture fut brisée et l’on ne trouva qu’un vieux parchemin écrit en latin et qui commençait ainsi :
«  LEGE, LABORA ORAZ, INVENIES » ( lis, travaille, prie, tu trouveras ). Le manuscrit fut délaissé. Il parvint entre les mains de notre moine qui espéra y trouver la révélation de la chimie transmutatoire et le secret de la pierre philosophale.
En ces temps singuliers, où la région d’Aurillac était pénétrée de la pensée religieuse, l’alchimie apparaissait, après le salut de l’âme, comme une des recherches fondamentales pour la vie humaine, car, en tant que création privilégiée, on pensait que l’or était à la nature ce que l’homme était à Dieu.
L’or des alluvions est plus pur que celui extrait du sous-sol. Celui d’Aurillac titrait alors 21 carats et on le fondait tel que la nature le donnait.
Bien entendu on voudra en saisir davantage et les toisons de brebis seront abandonnées au profit de méthodes industrielles plus productives. Le coût de la production surpassera alors celui du profit et l’industrie aurifère disparaitra en 1740.

Quant à Jean Roquetaillade notre moine, la postérité ne nous le livre pas comme le grand découvreur du miracle alchimique, il se tournera vers l’idéalisme et le mysticisme. Il fut probable qu’aussi longtemps que coulera la Jordanne nous chercherons encore à faire de l’or avec du plomb.

N’allez pas cependant « orpailler » la Jordanne au mois d’août, les saltimbanques  du Théâtre de rue s’y installent sur ses rives d’Aurillac, le bas étiage de la rivière n’est pas ragoûtant  et tout n’est pas du plus brillant.

Quant à ceux qui préfèrent voir dans la Toison d’or, un hommage aux chevelures blondes des auvergnates, ils les cherchent encore parmi toutes nos brunes cantaliennes.