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CANTAL-LIENS

 

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association de liaison pour la généalogie et l'histoire populaire du Cantal

...La généalogie autrement

 

 

Le « Mal de Saint Men » 

 

Dans nos campagnes cantaliennes, il est de ces belles et fraîches matinées d’automne où le creux de nos montagnes se cache dans un épais brouillard tenace qui nous dissimule la vue des habitants de la plaine. Il en est ainsi de la commune de Jalleyrac, noyée dans un vaste lac de brumes, illuminé par le soleil rasant. Trop lyrique mon propos ? Bon, alors  puisque nous sommes à Jalleyrac, parlons plutôt du « Mal de Saint Men »

Il s’y trouve une église dont une des chapelles est dédiée à St Men. Sa renommée attira de nombreux pèlerins malades de la peste, dite « Mal-de-Saint Men ». Pour que la prière du malade soit entendue, et quel que soit son rang dans la société, il fallait qu’il s’humilie lui-même en demandant l’aumône pour recueillir la monnaie destinée à payer ses messes en espérance de guérison. De plus, le malade devait encore boire l’eau d’une fontaine appelée Saint Men, dont la vertu contribuait à se débarrasser de la lèpre. On dit qu’un particulier du lieu a longtemps exploité la crédulité des pèlerins en leur recommandant de jeter quelques pièces dans cette fontaine que, bien entendu, il n’oubliait pas de repêcher pour son compte.

Ce pèlerinage devait son origine à une léproserie qui exista sur un plateau de la commune, à l’endroit appelé La Croix des Anders (ou Croix des dartreux). Cet établissement avait été fondé vers 1248, après que la peste et la lèpre furent apportées d’Orient par les croisés, faisant de grands ravages dans le pays. Il en est fait mention dans de nombreux titres des XIV ème et XV ème siècles. On suppose qu’on y brûlait les cadavres des lépreux, après leur mort.

En effet, de grandes précautions étaient prises pour les isoler de la population ; on les astreignait à porter des costumes que l’on distinguait de loin et à annoncer leur passage à grand renfort de crécelles. (on semble encore entendre dans les rues de Maurs, le sinistre roulement du tambour annonçant le lourd cortège des lépreux traversant la ville, dans le tournoiement de ces crécelles, dissimulés de bure noire et de capuchons pointus)

Durant les offices religieux on étendait dans l’église, devant l’autel, un grand drap noir soutenu par deux tréteaux. Le malade se plaçait sous l’étoffe, dans la position d’un mort et il entendait ainsi la messe, avec dévotion. S’il arrivait qu’un chanoine lépreux veuille assister à la messe, la communauté se réunissait au son de la cloche et allait, avec la croix, le chercher à son domicile. Il marchait alors, seul, derrière le crucifix, jusqu’au chœur et son siège à l’écart de tous. Après l’office, et toujours derrière la croix, on le conduisait vers l’extérieur de l’église, où un chariot l’attendait pour le reconduire à son domicile où un chanoine l’enfermait. Sous Louis XIV la léproserie de La Croix des Anders subit le sort de toutes les Fondations de ce genre, le roi les réunit d’abord, en 1672, à l’ordre de Notre Dame de Mont Carmel et de St Lazare, et, ensuite, en 1693, aux hôpitaux les plus voisins.

Nul doute que vous lirez à présent, d’un regard plus indulgent, ces premières lignes évocatrices des si belles couleurs et senteurs automnales des bois de notre Châtaigneraie cantalienne… Mais restez sur vos gardes en vous penchant trop en avant pour ramasser les champignons, car c’est aussi la chasse et nos chasseurs vieillissants on tendance à confondre le soleil d’automne avec … la lune ! (oh, …) (mais ces dernières lignes ne sont pas inspirées comme les précédentes, des récits de Mr De Sartiges-d’Angles)