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CANTAL-LIENS

 

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association de liaison pour la généalogie et l'histoire populaire du Cantal

...La généalogie autrement

 

 

Dans tous les esprits des anciens de Teissières les Bouliès, la « Marissou des ânes »  est le symbole de la grande aventure de son eau minérale.
Dans le Dictionnaire statistique du Cantal, en 1852, le docteur Nivel  présente ainsi cette eau :
« la source d’eau minérale se situe dans un vallon étroit et boisé, creusé dans un terrain primitif. L’eau jaillit d’un rocher très dur, des bulles d’acide carbonique la traverse et viennent crever à sa surface. Elle dépose une boue rougeâtre d’oxyde et de carbonate de fer, lui donnant une saveur aigrelette fort agréable et légèrement alcaline »

Une légende fortement encrée veut que cette source fut découverte par une vache. La bête quittait souvent son troupeau pour aller boire à cette fontaine. Intrigué par le manège, son berger en parla au Docteur Reygasse, habitant de la commune et propriétaire du troupeau. Celui-ci se rendit sur place, goûta l’eau, et la trouvant particulière, la fit analyser le 6 septembre 1821 par Monsieur Lapeyre, pharmacien à Aurillac. Celui-ci lui trouva des valeurs curatives, particulièrement pour soigner les maladies intestinales des enfants telles que les diarrhées, la fièvre, les maux de tête, l’anémie, etc.… Puis l’Académie royale de médecine, dans une communication très favorable, fit connaître cette source et donna un permis d’exploitation  .
 En vérité, comme pour une autre source de la même commune (au hameau de Canines) cette eau fût probablement connue des romains. En patois, on l’appelait la « Font salade » (l’eau salée).

Afin d’exploiter cette eau qui jaillissait dans le lit d’un ruisseau, on changea le cours de ce dernier et un chemin d’accès fut ouvert à travers bois, jusqu’au bourg de Teissières.
La source avait un débit de 3 litres à la minute et une température constante de 11°.
Les bouteilles étaient lavées, rincées dans le bourg, puis descendues à la source à dos d’ânes. Une fois remplies sur les lieux, elles étaient capsulées et rechargées dans des casiers en bois et remontées par les ânes pour le retour au bourg. Sous la pression des gaz présents dans l’eau, il arrivait fréquemment que des bouteilles éclatent en route.
Les animaux connaissaient bien leur chemin, mais ils obéissaient sans rechigner à une petite ânière qui s’appelait Marie et que l’on surnommait « la Marissou des ânes ».C’était chaque fois un spectacle que de voir et entendre le cortège sortir du bois et remonter d’un pas lent vers le village, dans un bruit cahotant de bouteilles se choquant dans les casiers, et cette photo carte-postale, fixa pour longtemps le souvenir de la scène.

Cette eau minérale connu une grande renommée. D’une pureté remarquable, elle était tonique, apéritive, très diurétique, facilitait la digestion, et redonnait à tout l’organisme , sa vitalité et son bien-être Exportée dans le monde entier, elle obtint à l’exposition universelle de 1900, la plus haute distinction des eaux minérales du Cantal.  

Le devenir de cette production est une longue histoire aujourd’hui éteinte. Comme toujours, le soucis d’une meilleure rentabilité mit en péril l’exploitation. Les ânes furent remplacés par des bœufs, pour tirer un chargement plus important. puis il fût installé un tuyau à pente régulière qui devait remonter l‘eau par sa pression, jusqu’au village et dont le long trajet dénaturait le produit à son arrivée. Convoitée par de grandes sources concurrentes, l’eau de Teissières fût rachetée, et l’on dit encore aujourd’hui que sous le prétexte d’en tirer un meilleur profit, le filon fût élargi à l’explosif et sa structure alors détruite pour éliminer cette production gênante

Il n’en reste aujourd’hui qu’un petit bâtiment dans le bas-fond des bois, abritant la source qui coule encore à faible débit, et qui agrémente une promenade fort plaisante.

Marcel ANDRIEU